L’encadreur de mon quartier m’a confié récemment 2 très grandes aquatintes (57 x 74 cm) retrouvées par un de ses clients dans sa cave, dans un état assez désespéré mais d’un grand intérêt par le renom de leurs auteurs et le sujet très plaisant.
Il s’agit de scènes de chasse dessinées par Carle VERNET et gravées par P-L DEBUCOURT, intitulées respectivement "le départ" et "la chasse".
Carle Vernet est né à Bordeaux en 1758 et mort à Paris en 1836. Il est le fils du célèbre peintre de marine Joseph Vernet et père d’Horace Vernet, tout aussi célèbre peintre d’histoire et de sujets militaires.
Sous le Consulat, Carle profita de sa connaissance des chevaux pour peindre des scènes de batailles mais durant la Restauration, le pays étant plus calme, il prit beaucoup de plaisir à dessiner et peindre des chasses à courre. Il faut dire que c’était un des meilleurs cavaliers de son temps, il était le compagnon de fêtes et de chasses du Duc d’Orléans. A l’âge de 75 ans, le matin, il montait encore régulièrement à cheval dans les allées du bois de Boulogne. Il avait une prédilection pour les pur-sang de course, fins et racés et rompait ainsi délibérément avec les traditionnels et lourds chevaux cabrés représentés par les peintres de son époque.
Philibert-Louis DEBUCOURT fût son contemporain puisqu’il est né 3 ans avant lui et mort 4 ans plus tôt (1755-1832). Il débuta par des tableaux de genre mais dès 1785, il renonça à la peinture pour se consacrer exclusivement à la gravure à l’aquatinte. Cette technique lui valut une réputation énorme car très en vogue à cette époque. Il collabora avec plusieurs artistes et notamment avec Carle VERNET dont il grava de nombreuses œuvres.
L'aquatinte est un dérivé de l'eau-forte (gravure en creux à l'acide sur une plaque de cuivre) mais la plaque est préalablement saupoudré de grains de résine de façon plus ou moins dense puis chauffée avant le tracé. Cette résine donne au final un aspect de points vermiculés lorsqu'on regarde la gravure à la loupe.
Voici quelques détails montrant l'état dans lequel se trouvait la première gravure et son état après restauration :
Le papier a subi une telle humidité prolongée que l'acidité du carton d'encadrement a très fortement et profondément oxydé le papier jusqu'à le trouer en une cinquantaine d'endroits. Il a donc fallu traiter l'oxydation, neutraliser l'action du traitement et stabiliser le papier, doubler l'oeuvre en totalité avec un papier japon assez épais à la colle d'amidon au verso, combler chacun des trous par le recto et enfin estomper chaque comblage.
La deuxième gravure dans un aussi piteux état a subi le même traitement et mon intervention a comblé d'aise l'heureux possesseur de ces grandes aquatintes.
Quelques détails, de mouillures notamment avant et après restauration :
Travail en cours de doublage et de séchage :
Ne laissez plus se détériorer vos trésors dans vos caves ou vos greniers, faites-les revivre, rien n'est irrécupérable malgré l'idée que l'on peut s'en faire...
(Source sur les peintres Vernet et
Debucourt :BENEZIT)