Le blog de Christine HERVOUIN

Je suis de retour à mon atelier après quelques semaines en Bretagne. Je vous espère tous en pleine forme pour la rentrée qui se profile.

J'ai eu la surprise de découvrir un article mettant mon travail de restauration  à l'honneur dans les colonnes de "Collectionneur & Chineur" du 3 juillet n° 201.

Ci-dessous un scan de l'article en question qui fait suite à une interview de Claude Franck lors du salon Toymania de décembre dernier et qui concerne mes interventions sur les jeux anciens.

Voici par exemple un cas qui semblait assez désespéré au départ et qui finalement a repris bonne figure après de nombreuses heures de travail.

Je précise que j'ai gardé tous les papiers et cartons d'origine.

Je profite de cette publication d'aujourd'hui pour vous informer que j'ai obtenu au mois de juillet mon CAP des arts de la reliure que je préparais depuis 2 ans aux AAAV (Ateliers des Arts Appliqués du Vésinet).

Cela me permet d'élargir encore mon domaine d'intervention et de vous proposer encore plus de services.

Ce charmant petit album des années 1900, assez épais, contient des photos de famille sur papier albuminisé.

Un tirage sur papier albuminé a un aspect brun qui peut paraître légèrement jaune, en particulier dans les parties claires de l'image. La surface du tirage est légèrement brillante et peut présenter un aspect craquelé en raison des propriétés de l'albumine (blanc d'oeuf) entrant dans sa composition. Sur un papier assez fin, les tirages albuminés sont le plus souvent collés sur un support plus épais : carton, papier pour éviter qu'ils se roulent ou s'abîment. C'est le cas pour ceux-ci.

(source : expertisephoto.com) 

Les photos sont glissées dos à dos entre 2 pages collées sur 3 côtés, qui sont montées sur onglet en toile et emboîtées dans une reliure plein cuir. Cette reliure est un pastiche des livres du Moyen-âge, ce qui était très à la mode au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, avec 2 fermoirs côté gouttière, des ferrures en laiton cloutés sur les plats recto et verso et un décor en creux et en relief sous la couvrure de cuir.

Comme vous pouvez le constater sur la photo ci-dessus, l'album n'a plus de dos. Du moins, il reste juste un petit morceau de cuir qui suggère le décor d'origine.

Etant donné que le livre est fragile lorsqu'on l'ouvre puisque les pages sont très rigides (à cause des photos doublées sur carton),  il va me falloir prendre cet élément en considération lors de la restauration. Je vais devoir refaire les tranchefiles qui ont disparues et mettre un soufflet dans le faux-dos pour augmenter la résistance du dos du livre à l'ouverture.

Comme vous le voyez, j'ai d'abord restauré les pages à l'intérieur de l'album.

J'ai ensuite refait un dos en cuir avec un soufflet invisible et restauré les coins. Le cuir neuf a été teinté à la couleur du cuir d'origne.

Pour rappeler le décor des plats, j'ai fait un décor en relief sur le dos qui reprend le style du motif qui ornait le dos manquant.

J'ai terminé par un nettoyage du cuir (éclaboussures de peinture ?) et des ferrures et agrafes (oxydation...) et un lustrage de finition.

Maintenant, cet album va pouvoir être consulté par plusieurs générations, descendant de ces personnes aux portraits figés pour l'éternité !

Il s’agit d’un jeu de cartes utilisant un tableau spécifique hexagonal dont les 6 cases correspondent au roi de pique, à l’as de trèfle, à la dame de coeur, au 10 de pique, au valet de carreau et au bog, cette dernière case servant à mettre les enchères.  Il se joue à 5 ou 6 avec  un jeu de 32 cartes. Chacun mise sur la figure qui est devant lui et le but est de former des combinaisons de cartes : bog (paire), mistin, brelan, brelan carré, etc…

Ce jeu serait un descendant du jeu de Poch, né vers le XVe Siècle en Allemagne et serait un « cousin » du jeu de Nain Jaune. Ce dernier n’a plus que 5 cases, celle des enchères a été supprimée. Le jeu de bog fut en vogue, en France, pendant environ 50 ans de 1855 à 1910. . Ce jeu deviendra un classique des éditeurs de la fin du XIXe siècle, avant de disparaître entre les deux guerres mondiales. Cette disparition coincide avec l’arrêt d’activité de beaucoup d’éditeurs de « jeux nouveaux » qui le produisaient et avec le succès progressif du poker en France.

Ce jeu intègre le «Grand Dictionnaire Universel du XIXe siècle» de Pierre Larousse en 1867, avec plusieurs expressions comportant le mot bog ou le verbe boguer. ( )

Les figures en pied du roi de pique, de la dame de carreau, et du valet de trèfle, sont dans le style dit « troubadour », très à la mode à l’époque des cartes éditées par Gibert à partir de 1848, dans ses « séries parisiennes ». Ce type de portrait fantaisie, fortement influencé par le style médiéval très prisé au milieu du XIXe, sera constant sur les jeux de Bog dans une première période allant de 1855 à 1870 environ.

Les six compartiments trapézoïdaux sont reliés entre eux par des charnières textiles pliables sur eux-mêmes, ce qui permet de le ranger dans une petite boîte triangulaire.

L’orifice central du plateau pouvait permettre de mettre une lampe ou un flambeau  au milieu pour éclairer la partie.

Source : Colloque du Vieux Papier à Issy les Moulinaux - novembre 2014                   Exposé de M. François RICHARD

Restauration de la boîte qui avait été réparée

précédemment "à l’ancienne"…

Avant l’invention du ruban adhésif SCOTCH en 1930 par un ingénieur de la société 3M pour l’industrie de l’automobile (qui servait de masquage pour la peinture des carrosseries) puis de sa diffusion au grand public après la 2ème guerre mondiale, la réparation d’une boîte de jeu en carton posait problème. Sa manipulation quasi quotidienne ou hebdomadaire la mettait assez vite dans un piètre état. La solution était alors de prendre un bon fil de lin, un dé (de couturière) et une aiguille et de recoudre tous les côtés bord à bord pour la consolider et la conserver le plus longtemps possible. J’ai eu entre les mains plusieurs jeux réparés de cette façon, notamment ce petit jeu de puce ci-dessous par exemple. (avant et après restauration)

En tout cas, pour une restauratrice, mieux vaut un jeu restauré de cette façon plutôt que bardé de ruban adhésif, recollé avec par exemple de la seccotine (qui servait à coller les rustines sur les chambres à air), ou bien avec tout ce que peuvent proposer les grands magasins de bricolage à l'heure actuelle, en passant de la colle pour pistolets à colle jusqu’au joint de salle de bain comme je l’ai vu quelques fois !

Pour cette restauration, j'ai donc démonté tous les éléments en coupant tous les fils de couture de la boîte et mis tous les cartons à nu pour pouvoir les réassembler et les recouvrir à nouveau des papiers d'origine.

Le plus délicat a été de remettre en état la lithographie illustrant le couvercle qui avait été bien grignoté par des insectes papivores. Un doublage de cette illustration avec un papier ancien m'a permis de faire des retouches de couleur à l'aquarelle et des reprises du graphisme à l'encre de chine. Cela m'a été facilité par le fait que l'on retrouve exactement la même image sur un des compartiments du plateau.

Et voici la boîte en bel état, prête à reprendre du service.

Ce coffret se présente comme un énorme livre de 30 x 60 cm sur 7 cm d’épaisseur. Il est recouvert d’une toile rouge au niveau du dos et d’un papier rouge avec un grain fin imitant le cuir sur les deux plats. La tranche en bois est recouverte d’un papier marbré « petit peigne » , couverture typique des reliures des cartonnages de cette période.  Les inscriptions sont marquées en lettres dorées. De gros clous cabochons en laiton renforcent cette magnifique boîte. Elle se  ferme par 2 tiges de laiton ouvragées  qui sont malheureusement manquantes sur l’exemplaire que j’ai à restaurer.

L’intérieur est recouvert de la carte du réseau ferré français et européen tel qu’il était en 1886. Des rubans de coton rouge permettaient de maintenir en place tous les éléments d’un vrai petit train et de ses rails en état de fonctionnement. Les voitures peintes indiquent leur destination : Paris-Calais-Londres. En effet, c’est l’hiver 1886 que fût créée la ligne Calais-Méditerranée express. C’est le « English Club Train » qui assurait la connexion de Londres à Calais et Paris, filiale de la Compagnie internationale des Wagons-Lits. Ils offraient aux passagers un aller-simple de Londres à Douvres par train puis par bateau jusqu’à Calais et à nouveau par train jusqu’à Paris, sur cette nouvelle ligne. C’était le moyen de transport idéal pour les anglais qui voulaient passer l’hiver sur la Côte d’Azur. Cette boîte pourrait être le cadeau d’inauguration pour les célébrités utilisant cette ligne car elle semble avoir été faite à cette occasion. On peut distinguer la nouvelle ligne sur la carte de cet agenda.

L’exemplaire que j’ai eu entre les mains avait un côté complètement détaché avec un petit manque de bois, tous les chants des cartons étaient pratiquement à nu et ouverts, les 4 coins carton étaient à reformer et tous les rubans plus ou moins mités ou manquants étaient à changer. La carte à l’intérieur était déchirée sur un angle et un côté.

La restauration a été assez délicate. Une fois le côté en bois refixé, j’ai pu réparer le carton sur tout le pourtour à la tylose, recouvrir les chants de papier japon, reconstituer les coins, remettre tout à la teinte du papier rouge d’origine.

Pour l’intérieur, j’ai réparé les déchirures de la carte. Il a fallu ensuite inciser celle-ci au niveau des rubans pour pouvoir enlever les anciens et en poser de nouveau dont les extrémités ont été cachées dans l’épaisseur du carton.

Voilà ! le train F.V. Paris-Calais-Londres va pouvoir retrouver son superbe écrin, pour le plus grand bonheur de son propriétaire !

Ce salon se tiendra dimanche prochain au palais des congrès - porte Maillot à Paris. Vous pourrez me rencontrer sur le stand S4.

(voir infos pratiques sur le site : www.toymania.org)

Voici l'article me concernant que TOYMANIA a mis en ligne sur le site ci-dessus il y a quelques jours :

"Sur le stand de Christine Hervouin, à Toymania le 7 décembre 2014, pas de jouets mais des restaurations de boîtes de jeux et de jouets réalisées par ses soins. Si comme nous, il traîne dans votre collection des boîtes qui mériteraient mieux que leur présentation actuelle, allez vite la voir.

Cette professionnelle est une magicienne. Dans son atelier de Colombes (92), elle soigne toutes les plaies et déchirures de nos fragiles emballages en papier et carton. Elle n'a pas son pareil pour réparer les angles ouverts d'une boîte, reconstruire les côtés d'un couvercle, détacher une illustration ou faire des retouches de teintes. Au besoin, elle peut même changer les charnières d'un jeu de plateau. Il faut dire qu'en quatre années d'exercice après une formation de 3 ans en tant que restauratrice de documents graphiques suivie d'une paire d'années consacrées à la restauration de livres, elle s'est aguérie sur tous types de supports : estampes, oeuvres originales, BD. Tout cela avant de se découvrir un nouveau domaine où exercer son talent : la restauration de boîtes de jeux en cartonnage.

Patience et précision du geste :  "C'est devenu une nouvelle passion. Les boîtes requièrent une patience infinie et une grande précision du geste. Je conserve tous les éléments d'origine. J'utilise le moindre lambeau de papier ou de carton encore présent mais il m'arrive aussi de remplacer des éléments trop abîmés par des papiers anciens ou vieillis. J'utilise des colles conservation au PH neutre agréées par la Bibliothèque Nationale..."

Dernièrement, Christine Hervouin s'est vue confier plusieurs boîtes de jeux pour l'exposition au Palais du Roi de Rome à Rambouillet "14-18 - Les jeux de l'oie de la Grande Guerre". D'autres sont en cours pour la future exposition au Conservatoire du jeu à Boulogne-Billancourt dèbut 2015. Autant dire que le savoir-faire de Christine Hervouin est en mesure de satisfaire les collectionneurs les plus exigeants.

Ne laissez pas passer l'occasion de revaloriser votre collection, faites quelques photos de vos boîtes en souffrance et montrez-les à Christine Hervouin lors du prochain salon Toymania. Elle se fera un plaisir d'estimer gratuitement le coût d'une éventuelle restauration.

Ci-dessous exemple de restauration du jeu de la mare au grenouilles de la fin du XIXe : il était bardé de scotch marron d'emballage sur l'extérieur et l'intérieur du couvercle.I'adhésif a été retiré. Le plateau du jeu était également en plusieurs morceaux, les charnières ont été refaites, la règle du jeu tombait en petits morceaux, elle a été réencollée et les déchirures ont été réparées.

                    PHOTOS AVANT ET APRES RESTAURATION